En 2023, près de 60 % des écoles en France ont intégré des outils numériques pour accompagner les apprentissages. Certaines plateformes adaptatives ajustent déjà leurs exercices selon le niveau de chaque élève, sans intervention humaine. Pourtant, malgré la généralisation de ces dispositifs, les performances scolaires stagnent dans plusieurs pays européens.
À l’inverse, certains établissements ayant misé sur l’enseignement traditionnel constatent une progression des compétences sociales et de la motivation. L’efficacité respective des enseignants et des technologies éducatives interroge, alors que les attentes envers l’école continuent d’évoluer.
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Pourquoi l’ordinateur s’impose-t-il dans les salles de classe ?
Jamais l’ordinateur n’a eu autant de présence entre les murs des écoles. Derrière le bureau de l’enseignant, mais aussi dans les mains des élèves, parfois dès le plus jeune âge, le numérique s’installe. Ressources interactives, manuels sur écran, plateformes d’exercices en ligne : les outils se diversifient à grande vitesse.
Si le numérique prend une telle ampleur, c’est que ses promesses séduisent. Il ouvre la porte à des pratiques pédagogiques variées. Un tableau interactif permet à toute la classe de manipuler un texte, d’explorer des images, d’aller d’une ressource à l’autre en un clic. Les élèves, eux, peuvent accéder à une multitude de contenus grâce à leur tablette, à des espaces partagés sur le cloud ou, plus simplement, à une clé USB.
Derrière cette évolution, les collectivités locales se mobilisent. Des départements comme le CD13 dans les Bouches-du-Rhône investissent dans l’équipement, assurent la maintenance des salles informatiques. Le vidéoprojecteur s’est fait une place de choix ; il transforme chaque cours en expérience visuelle partagée.
Voici quelques usages concrets qui redéfinissent la routine de nombreuses écoles :
- Automatisation des corrections et suivi individualisé grâce à l’analyse des résultats collectés
- Partage de documents en temps réel, mutualisation rapide des ressources entre enseignants et élèves
- Sessions de formation régulières pour permettre aux professeurs de s’approprier les outils numériques
La salle informatique devient le théâtre d’activités inédites : ateliers de codage, montages vidéo, projets collaboratifs en ligne. Certains enseignants voient des élèves habituellement discrets s’engager davantage grâce à ces supports. Pourtant, cette montée en puissance du numérique invite à réfléchir : tout le monde y a-t-il vraiment accès ? Les données sont-elles bien protégées ? L’équilibre avec les méthodes traditionnelles reste à trouver.
Enseignant et technologie : deux approches complémentaires pour apprendre
La technologie transforme la façon d’apprendre, mais l’enseignant reste l’élément moteur du parcours scolaire. Face à la profusion d’outils numériques, le professeur ne se contente plus de transmettre des savoirs : il guide, personnalise, ajuste en fonction des besoins réels de chaque élève. Son rôle s’élargit, il devient chef d’orchestre du parcours de l’apprenant numérique.
Les méthodes de pédagogie inversée illustrent bien cette nouvelle donne. Les élèves découvrent chez eux, via des vidéos ou des modules en ligne, les notions qui seront ensuite discutées et approfondies en classe. Cette organisation donne plus de place à l’échange, à l’écoute active, à la reformulation. L’enseignant apporte une valeur unique : sa passion, sa capacité à stimuler la réflexion, à déclencher la curiosité collective.
Voici deux dynamiques qui s’observent de plus en plus souvent dans les classes :
- La technologie soutient la collaboration : projets partagés, échanges sur les médias sociaux, jeux éducatifs en ligne dynamisent la vie de groupe.
- L’enseignant assure un accompagnement sur mesure, adapte ses supports, crée du lien et rassure les élèves en difficulté.
Dans bien des cas, le numérique simplifie la gestion de la classe. Mais quand il s’agit d’encourager un élève en perte de confiance ou de rebondir sur un imprévu, rien ne remplace la présence humaine. L’association des deux, machine et enseignant, dessine un modèle d’apprentissage où chacun trouve sa place : l’outil rend service, le professeur inspire.
Peut-on vraiment comparer un instituteur et un ordinateur ?
Comparer un instituteur à un ordinateur : la question paraît brute, presque dérangeante. D’un côté, la machine applique des instructions, corrige sans jamais fatiguer, gère d’immenses volumes de données. De l’autre, l’enseignant mobilise son intelligence relationnelle, ajuste son propos, perçoit les doutes même silencieux. L’automatisation séduit par sa rigueur, mais la personnalisation exige une attention, une capacité à deviner les besoins derrière les mots.
L’université d’Oxford l’a rappelé : la fonction d’enseignant résiste à la robotisation, justement parce qu’elle repose sur la complexité des liens humains. Même dans les filières professionnelles, l’informatique donne accès à des ressources variées, mais ne remplace ni le vécu, ni l’expérience, ni l’intuition d’un pédagogue aguerri.
Voici ce qui distingue fondamentalement l’humain et la machine dans la transmission des savoirs :
- L’enseignant personnalise l’apprentissage : il perçoit les besoins, adapte son approche, ajuste sa posture au fil des échanges.
- L’ordinateur enregistre, propose, archive, mais fonctionne selon des logiques strictes d’analyse de données.
À l’adolescence, les élèves ont besoin d’un cadre, d’une présence, d’un regard rassurant. L’ordinateur progresse sans relâche, mais la gestion de l’imprévu, la spontanéité, la capacité à donner confiance demeurent l’apanage du maître. Mettre les deux sur le même plan, c’est oublier que l’un vit dans le langage et l’échange, l’autre dans l’exécution de tâches programmées.
Débattre ensemble : quelle place voulons-nous donner à l’humain et à la machine dans l’éducation ?
À l’heure où l’informatique s’immisce dans chaque classe, la question de l’équilibre entre accompagnement humain et machine se pose avec acuité. L’ordinateur, par sa puissance de calcul et sa capacité à organiser l’information, bouleverse les codes de l’enseignement. Mais à quoi bon la performance technique, si la relation entre l’enseignant et l’élève s’affadit ?
La présence d’un adulte attentif, formé à repérer les besoins particuliers, à ajuster ses méthodes, à nourrir la curiosité, demeure la pierre angulaire du parcours scolaire. L’ordinateur, lui, multiplie les accès à l’information, facilite la différenciation des parcours, mais ne peut offrir l’élan d’un encouragement ou la finesse d’un conseil. Bernard Revel, président de l’association Des Souris et des Mômes, le résume sans détour : « Le numérique, c’est un levier, pas une finalité. L’humain demeure le pilier. »
Trois aspects méritent d’être soulignés pour éclairer ce débat :
- La passion de l’enseignant rassemble, motive, donne de la cohérence aux apprentissages.
- La santé, la confiance de l’élève se construisent aussi dans l’accompagnement humain.
- L’ordinateur structure les données, trace des parcours, mais il ne remplace ni l’écoute, ni la capacité à improviser.
L’école ne se limite pas à la transmission de compétences : elle façonne des personnalités, prépare à la vie collective. La combinaison subtile de la technologie et du lien humain dessine aujourd’hui le visage de l’éducation. Chaque acteur, du professeur au parent, du développeur à l’employeur, a sa part à jouer dans cette transformation. Reste à choisir quelle société nous voulons bâtir, et quelle place nous réservons à ceux qui la feront grandir.


